Jan 28, 2009
Samedi Soir sur la Terre
Jan 24, 2009
Le livre d'heures [d'hiver]
L’hiver, ici. J’aime au final ces heures sombres qui portent bien leur nom en anglais – twilight, betwixt the light – car elles précédent l’aube et suivent le crépuscule. Le matin, en salle 107, cours de thème du vendredi. Dehors, les bâtiments, la chapelle d’en face, les arbres et le ciel se confondent dans des écharpes de bleu nuit – mais à une fenêtre, dans l’interstice entre encadrement et rideau, une seule ligne dorée. Bougie ou lustre ? On n’en saura rien. Il pleut et vente toute la journée, les rues crient comme des banshees. L’après-midi est déjà entré en collision avec le soir quand je sors du lycée ; la chape des nuages est de nouveau d’un bleu sombre et elle recouvre tout, sauf à l’ouest : entre l’autoroute et les nuages, une bande de ciel, jaunie-orangée par le soleil couchant, très claire entre les arbres. Là-bas – aucun nuage, et le soleil est allé se coucher derrière un immeuble. La sensation qu’il faudra toujours chercher l’horizon, parce qu’ici n’est jamais là.
Jan 18, 2009
So there.
Jan 17, 2009
Cascabelles et Mississippi
Ici, la neige a disparu depuis longtemps, mais le froid persiste en demi-teinte. Bien sûr, il ne fait plus -5° mais la terre ici a encore besoin d’un peu de gel. Eliot l’a bien dit : « April is the cruelest month of the year, breeding lilacs out of the dead ground… », avec la voix rauque et traînante. La pluie a tout balayé, mais n’a apporté même pas un semblant de ‘chaleur’. Cet après-midi, le soleil est là, avec du vent, et tout le jardin est constellé de gouttes d’eau. Je n’ai jamais ressenti un tel besoin de printemps, si fort et si précoce. J’ai peur que le Prunus ne refleurisse pas, et j’ai peur que le printemps n’arrive pas assez vite. J’ai envie de crier que je me sens vidée, incapable de continuer, que j’ai besoin d’un nouveau souffle, et vite. Encore le désir de partir, pour tout laisser de côté. En écoutant Cabrel, l'envie d'aller faire un tour vers la cabane du pêcheur.
En attendant l’équinoxe, on tente un hiatus avec l’écriture.
We’re reading Faulkner, As I Lay Dying, and I can’t help seeing a reflection of one’s soul in it. The tale of the slow, insidious shattering of a family after the mother’s agony and death, As I Lay Dying is told in a strictly polyphonic manner, and the seemingly obvious reality of the Mississippi county is eventually caught in a spiral of questions as each character’s subjectivity, sometimes going as far as solipsism, emerges and asks to be considered as an authority.
The departure of one member of the family is enough to unravel the other characters’ frantic thoughts as the mother was probably the only thing holding them together. In this respect, the departure of the mother implies the appearance of family secrets that give at least a partial explanation to the latent tensions. Jewel was his mother’s favorite – her ‘gem’ – but all along, he is thought to be the most uncaring, insensitive child: the jewel’s beauty, conceived in adultery, is coupled with a violence that the young man will never be able to shove aside completely; but he does prove the gossiping neighbors wrong when he is the one, at the end, who rescues the mother’s casket from the barn fire. Dewey Dell, after dealing with her mother’s death, has to deal with another life that she did not want to see appear: the result of her relation with Lafe, a relation she tries to keep secret but which she suspects Darl has already guessed the existence of. Darl, her older brother, probably knows many things, as is indicated by his having the most sections in the book, though he is rarely present as something more than a silhouette. He is the one that has the most acute eye for details, the most prone to speak a poetic faulknerian language, even though he is no more educated than the others. He is the one we are led to trust as the most reliable narrator, and he is the one who will become crazy in the end.
One of the striking features in this novel is the discrepancy between the uncouthness of most characters and their ability to put into words – even if it’s nothing more than some confused gibberish – the sensations they get from watching the landscape, or witnessing the situation. This discrepancy is coupled with another one between the characters’ poetic capacities and their complete inability to communicate among each other – excepting, to some extent, the communication ‘without the words’ between the three siblings Dewey Dell, Darl and Vardaman, who almost become ‘twins’ in the way they express themselves when possessed by the identification with their dead mother. When most characters have to exchange information, their words are stripped down to the barest minimum, leaving almost skeletons of words that mirror, in a Shakespearian reminiscence, the influence of a barren, overpowering landscape on the characters that are mere prisoners of the wider drama of the elements.
But of course, there is no need for suspension of belief, or any novelist trick like that – what Faulkner aims to show here, among other goals, is that even though people seem to be unable to use the normal, everyday language to communicate and, more importantly, express themselves, that does not mean they are not able to ‘enjoy’ a wide spectrum of sensations and/or feelings that they can word into their own language (which does not necessarily pass through words).
All this to say that the novel almost vibrates with a kind of desperate energy, desperate to grasp the true essence of humanity, one that would go beyond any philosophical systematization, one that would prove that fiction is a perfectly relevant way to consider what it means to be human, ‘too human,’ would have said Nietzsche.
Jan 12, 2009
Round Midnight
Et l’envie désespérée de partir.
Mais comment fredonner Je Te Veux si personne n’entend ? De Satie, on passera à Gerswhin, et fermer les yeux, lentement. Il n'y a plus rien à dire, quand on passe maître dans l'art de l'invisibilité.
Jan 6, 2009
bref.
Jan 4, 2009
Solitude Standing
Je nage en pleine crise. Les Beings se dérobent à qui mieux mieux, et je saisis maintenant les migraines dont peut souffrir un démiurge face au problème épineux de la création d’un Mônde. En plus les gens réclament un nom, quelque chose qui leur convienne. C’est qu’ils ont de ces exigences… Celui qui croyait que les avoir créés était raison suffisante pour les contrôler entièrement devait avoir sacrément picolé la veille. Je ne sais même plus en quelle langue je devrais écrire.
Je me suis racheté des cartes postales pendant l’après-midi resto-ciné avec A. Il faisait froid dans les rues de Valenciennes. Puis, de retour à la maison, la famille d’un ami à mon frère était là. Et quand eux sont partis, le ciel était noir, avec des reflets orange, et le ciel neigeait.
« Il y avait un grand vide, dans lequel une épine était fichée, et puis le vide saignait. »
Un vrai mois de janvier, tout ce qu’il faut de stérile, de gelé, de morne. Même pas une montagne ou deux pour purifier l’atmosphère.
Et puis il y a tout ce que j’ai à faire aujourd’hui et que je ne ferai pas. J’ai envie de croire encore (un peu) à l’infini.
« Après tout, on a beau connaître les bouquins, eux ne nous connaîtront jamais. »
C’est sûr qu’ils ont besoin d’être lus pour exister, mais ils n’ont pas besoin de nous singulièrement. C’est ça qui est un peu triste, dans la lecture. Le livre s’offre, mais il ne s’offre à personne en particulier. L’auteur écrit, il écrit pour nous tous, mais jamais pour nous en particulier, jamais pour nous qui apportons notre lot de qualités et de défauts, notre paquet de chair, d’os et de sang. Le vrai amour des livres est totalement désintéressé et sans retour. Eux sont en revanche dûment intéressés, nous pompant la vie jusqu’à la moelle, jusqu’à ce que la signification de ‘vie réelle’ nous échappe.
C’est ça, ou presque. Car on s’habitue à ces êtres légèrement vampiriques, qui donnent la même réponse, sans tenir compte de l’identité de celui qui a posé la question. On s’habitue aux fantômes turbulents d’auteurs et de personnages, qui finissent par apparaître en décalqué sur ce qui se passe autour de nous. Même chose pour les mythes, les légendes. Là-bas, avec les autres, on rit de ces croyances superstitieuses ; mais ici, quand il n’y a personne, on les cherche toujours, espérant les apercevoir.
On n’a qu’à aller casser quelques miroirs, histoire de confirmer la présence de ce « jinx » ; puis on ira écouter Lovers in Japan en attendant que le temps passe.